Par Jean Prieur.
Les hommes de ma génération, j’avais 30 ans en 1944, ont été terriblement choqués que la reine Elisabeth II d’Angleterre n’ai pas été invitée aux cérémonies qui ont célébré le débarquement de Normandie. Tout le côté spirituel de ce grand évènement a été gommé. Sait-on encore qu’en juin 1940, au moment de la ruée des chars allemands sur l’Europe de l’ouest, la situation était absolument désespérée. La Belgique, les Pays-Bas, le Danemark étaient submergés, leurs souverains étaient, soit prisonniers dans leur palais, soit réfugiés à l’étranger. Paris, Lyon, Clermont Ferrand étaient occupés, le gouvernement français ne tenait plus que Bordeaux.
Ne restaient libres que l’Angleterre, le roi Georges VI, son épouse, la reine Elisabeth, Churchill et Lord Dowding (1882-1970) « maréchal de l’air qui commandait la chasse britannique et joua un rôle décisif dans l’échec allemand durant la bataille d’Angleterre (avril-octobre 1940) » Ainsi parle le Petit Larousse illustré de 2005. Par contre son rival le Maxidico de 1996 ignore délibérément Lord Dowding – alors qu’il fait place à n’importe quel barbouilleur, plumitif, gratteur de guitare, chanteur aphone, ou sous-fifre politique. Je suis donc bien content d’être encore de ce monde pour lui apprendre ou lui rappeler les faits suivants : Sir Hug Dowding était spiritualist, son médium était sa secrétaire Mrs. Hunt. Tous deux interrogeaient l’au-delà qui répondait par l’entremise des jeunes aviateurs tombés : « Tenez bon ! tenez bon ! Les Allemands ne pourront jamais débarquer. Surtout ne capitulez pas ! Ne capitulez jamais, jamais ! Les Nazis sont foutus. Hitler est foutu ! God save the King ! God save the queen Elisabeth ! » Cette queen dont je ne trouve pas trace dans le Petit Larousse était l’épouse de Georges VI. C’était une jeune femme timide, d’apparence fragile qui vécut jusqu’à l’âge de 101 ans.
Lord Dowding tenait les souverains britanniques au courant de ses communications avec ses boys du monde parallèle. Au pays des spiritualist churches n’existe pas cet interdit propre aux pays latino-catholiques. L’injonction des boys galvanisa la mère d’Elizabeth II, et la révéla à elle-même… Désormais sa voie était toute tracée. Pas question de quitter Londres et Buckingham Palace. Pas question d’envoyer au Canada les petites princesses Lisbeth et Margaret. Pour maintenir le moral de la nation, il fallait rester avec elle, partager ses dangers et ses privations. Les souverains britanniques allaient parmi les champs de ruines, réconforter les survivants des bombardements.
Dans la France occupée, on s’interrogeait : « Tiendront-ils ? Tiendront-ils ? Pourvu qu’ils tiennent ! » Eh bien, ils ont tenu grâce à la BBC ? Grâce à la voix de la reine qui venait de découvrir cette arme formidable : le micro. Tandis qu’Hitler lançait sur les ondes son galimatias de haine et de fureur imbécile, elle entretenait le moral de ses concitoyens grâce à sa parole assurée, calme, énergique, efficace. Tout ce miracle fut possible parce que, à l’exception des iles anglo-normandes, la terre britannique ne fut jamais occupée, et les nazis ne débarquèrent jamais, comme les boys l’avaient annoncé.
Du côté des Français de Londres, il en allait de même, et là, je dois mentionner Denis Saurat qui faisait partie de l’entourage du général De Gaulle et dont j’ai parlé dans un de mes livres. Oui, mais lequel ? Tout ce que je sais, c’est que Saurat, rentré à Paris, fit partie du cercle de fervents qui se rassemblait au début des années 1950, au 194 rue de Rivoli autour de Marcelle de Jouvenel et de Gabriel Marcel.
En absolue sincérité.
Jean Prieur